Au large du Cap St Vincent... #ANECDOTE

Juin 1994. Avec 4 amis nous convoyons un vieux gréement (ou voilier traditionnel) de Bordeaux à Argeles sur mer.

Cela implique de contourner toute la péninsule Ibérique via Gibraltar.

Le voilier est une ancienne gabarre de mer d’Iroise, l’Audiernais. C’est un navire de charge, assez large et ventru qui servait au transport de matériel. Un « cargo » à voile de 1936. Sa longueur, 18 m, avec le bout-dehors, 26 m, soit juste 9 mètre en avant de l’étrave. On n’en fait pas des comme çà dans la course au large aujourd’hui !

A bord, pas de GPS à cette époque, mais un Loran-C qui n’a jamais fonctionné, récupéré on ne sait où.

Donc nous naviguons à l’estime et nous nous recalons dès que la côté est à porté de vue.

Arrivé au niveau du Portugal nous subissons un coup de vent (force 8) de nord. Le fameux «Alizé Portugais» bien musclé. Nous réduisons la toile (1 ris dans la grand voile de 100 m²) et foc. La trinquette et le tape-cul sont affalés. Çà déboule fort ! 8/9 nœuds bien réguliers et des surfs, oui, des surfs à plus de 12 nœuds avec ce petit monstre de 45 tonnes.

Le cercle d’incertitude de l’estime s’agrandit plus le temps passe. La côte n’est pas en vue, pas d’amers pour se recaler.

Arrivé à proximité du D.S.T (voir nos articles précédents) du Cap St Vincent, de nuit, nous décidons de tenter de contacter par VHF un des nombreux cargos qui nous entourent, la visibilité est bonne. Nous donnons notre route, notre vitesse et une position approximative. Un des hommes de quart nous réponds en français avec un fort accent, probablement Algérien, il dit nous avoir « plotté » sur son radar avec les éléments transmis, et dit se dérouter légèrement vers nous. Arrivé à notre hauteur (en fait, il est derrière nous car suite son appel on voit effectivement, grâce aux feux de navigation, un cargo changer légèrement sa route), nous devrons éclairer la grand voile afin qu’il s’assure qu’il s’agisse bien de nous.

Tout se déroule comme décrit, et arrivé à notre hauteur, il nous précise notre point en latitude et longitude.

Vous pourrez trouver çà incroyable, à l’ère du GPS et des tablettes connectées, mais toute cette histoire est vrai. Il m’est personnellement arrivé plusieurs fois de me faire confirmer une position par un navire de pêche ou de commerce.

En cas de doute, (problème technique, électrique) n’hésitez pas. La solidarité des gens de mer existe.

Bon vent et naviguez Safe !